Ta voix, le timbre de ton souffle.
Repose en paix Ahmed Kourouma.
Il y’a moins de deux mois, je t’avais demandé de venir poser ta voix sur les textes de jingles d’une nouvelle radio, ‘gratuitement’’, insistais-je. Et tu as éclaté de rire, de ton rire sonore qui finissait par un hoquet et qui déridait ton interlocuteur.
Ta voix, ta liberté de ton et cette insouciance joyeuse que tu avais l’art de distiller si facilement…
Mon esprit est embrouillé, cherchant à te retrouver, à saisir les instants que nous avons partagés.
Des souvenirs, comme ce jour où tu ne comprenais pas qu’on t’inflige des embûches pour accéder à ta carte de presse, cet autre jour où je te demandais comment tu as pu rester aussi longtemps loin des projecteurs avec ce timbre de voix qui faisait ta particularité.
Tu avais ce détachement enjoué de ne point t’attarder sur l’interpellation de ceux qui ne pensaient pas comme toi, mais de garder le cap, ta présence, ta vision, ta liberté.
Tu resteras comme l’une des meilleures trouvailles de Hadafo médias, celui-là qui titillait l’intelligence et l’approbation contenue de personnes qui réfléchissent en silence, qui esquissent un sourire sur certaines de tes interventions.
Ta voix, ce timbre, une perle.
Je n’ai pas su que tu avais maille à partir avec la fille d’Asclépios et d’Épione de la vieille Grèce, pour parler comme tu aimais le faire. Tes derniers instants, ton dernier souffle, ton regard avant que ne se referment tes paupières.
Rarement, j’ai été marqué aussi profondément par la perte d’un confrère. Je n’étais pas du cercle de tes intimes mais je me permets de clamer que tu étais bon, que tu croyais en Dieu, que tu te démenais à n’écorcher personne autour de toi. Cela pouvait arriver, mais ce ne serait pas parce que tu l’auras voulu.
Mon cher Ahmed, j’ai préféré adopter ce ton, m’adresser directement à toi comme pour atténuer la douleur que je ressens de ne plus te voir, de ne plus échanger avec toi.
Repose en paix, petit frère.